Bonjour à tous,
Bientôt mi-novembre et vous êtes déjà quelques-uns à vous être abonnés à mes lettres !
“Ton projet est super, ça donne envie d’acheter Un peu Beaucoup des albums jeunesse” m’a-t-on dit. Et, ça me donne bien l’envie de continuer sur ma lancée, surtout au jour d’aujourd’hui, quand nous avons tant besoin de nous raccrocher à du sens et aux histoires.
Lorsqu’on s’intéresse aux albums jeunesse en lien avec l’écologie, on peut trouver facilement sur le web des listes thématiques qui répertorient les albums en fonction des thématiques environnementales rencontrées.
Je m’aventure pourtant avec une certaine prudence dans la lecture des albums dont la thématique écologique est explicite.
C’est que je redoute les bons vieux rouages d’une littérature pour la jeunesse, une tendance très didactique, quelque peu moralisatrice et hyper-responsabilisante, puisqu’il s’agit tout de même de sauver le monde.
Je me demande alors dans quelle mesure, parfois, ces lectures ne nous font pas perdre l’alchimie d’une rencontre : avec le livre, avec la nature, avec le raconteur, avec le racontage.
Serge Martin, qui est docteur et professeur en littérature à la Sorbonne, mentionne combien il peut y avoir là un paradoxe propre aux livres engagés : “ils peuvent dégager le lecteur de tout engagement, en faisant taire le langage”.
Il s’agit alors de ne pas attribuer la portée écologique de l’album au seul contenu thématique mais de percevoir comment ça raconte.
Si nous prenons l’exemple de l’album d’Olivier Tallec “Un peu Beaucoup”, il est moins question d’enseigner ou de prescrire les bons gestes que d’ouvrir in fine un espace de réflexion sur le rapport à l’Autre. Et cela se dévoile tout en finesse, par le processus de découverte du livre.
L’album fait alors deviner, plus qu’il n’enseigne ou dénonce. Il questionne plus qu’il n’affirme. Il invite plus qu’il n’impose. On pourrait dire que tout en cheminant avec l’album, la lecture devient philosophique.
Pour nous, raconteurs, cela implique nécessairement de pouvoir choisir les albums avec soin, de nous rendre attentifs non seulement au contenu mais aussi et surtout à la manière avec laquelle l’album (nous) engage dans sa singularité : un livre dont la lecture est toujours à défaire, refaire, de la même manière que l’on fait et refait le monde.